21 avril : Valence – Charmes sur Rhône = 15 km
22 avril : Charmes sur Rhône – Montélimar = 50 km
23 avril : Montélimar – Bourg-Saint-Andéol = 35 km
24 avril : Bourg-Saint-Andéol – Caderousse = 48 km
25 avril : Caderousse – Avignon = 39 km
Puis direction Arles en train.
Je suis ravie.
Angeline, ma fille ainée, va faire un bout de route avec moi. Pour elle c’est une première; elle n’a jamais fait de voyage à bicyclette. J’espère que cela va lui plaire et que nous allons nous faire de jolis souvenirs communs.
Nous sommes à peine parties que déjà le pédalier de son vélo flambant neuf claque à chaque coup de pédale. C’est inquiétant et très pénible pour elle. Nous poursuivons tout de même notre route. Il fait beau. Nous nous arrêtons pour nous ravitailler dans un village typique avec son château surplombant les maisons et sa place animée avec son petit marché coloré où les horticulteurs de la région viennent vendre des fleurs et des plans de légumes. Cela sent bon la rose, la lavande. Des herbes aromatiques sur un étal diffusent un merveilleux parfum qui nous donne des envies de jardinage.
Le soir nous installons nos tentes dans un camping, plusieurs cyclotouristes sont déjà installés. Ce sont surtout des familles avec des enfants. Notre voisin un retraité qui vit à l’année sur le terrain, seul dans sa caravane, propose de nous prêter ses lampes de poche super puissantes. Nous avons les nôtres mais il est tellement gentil que nous n’osons refuser. Nous sympathisons avec un couple en camping car qui nous invite à boire l’apéritif. Ils ont la cinquantaine et se sont rencontrés il y a quelques mois en boîte de nuit, depuis lors ils ne se quittent plus. Corinne vient de se faire tatouer au dessus de la poitrine le drapeau Corse en l’honneur de ses origines. Par amour Eric en a fait de même bien que sa famille ne soit pas native de l’île de beauté et qu’il n’y soit même jamais allé. Ils sont touchants.
Le lendemain nous plions nos tentes sous la pluie. J’ai eu la chance d’avoir un temps magnifique pendant tout le début de mon périple mais hélas depuis qu’Angeline m’a rejointe le temps s’est dégradé. Heureusement durant cette journée le ciel reste gris mais nous aurons la chance de ne pas être mouillées. Le vélo d’Angeline ne fait plus de bruit mais par contre c’est maintenant l’espace entre le cadre et le pédalier qui nous parait anormal.
A l’étape du soir, nous faisons part de notre problème mécanique à la propriétaire du camping qui semble avoir quelques connaissances en la matière.
Elle est fière de nous raconter qu’elle a participé aux jeux olympiques d’Atlanta. Elle a concouru dans les épreuves de cyclisme par équipe. Elle en profite pour jeter un coup d’œil sur le pédalier de notre machine. Comme elle ne trouve pas de solution elle charge d’autorité le vélo et sa propriétaire dans son véhicule utilitaire direction le mécanicien local. Finalement lui non plus ne trouvera rien d’anormal qu’importe nous voilà rassurées maintenant.
Ce soir là le vent se lève, la pluie se met à tomber. Nous faisons le choix de ne pas dormir sous la tente et nous louons un mobile home. Ainsi nous passons une excellente soirée au chaud avec une bonne bouteille de vin du cru, le luxe en quelques sortes.
Le lendemain nous avons le vent de face. Nous pédalons toute la journée sous de fortes rafales. Notre moyenne passe de 15km heure à 8. Nous sommes crispées sur notre guidon. C’est une lutte de chaque instant. Lorsque nous changeons de direction et que le vent nous pousse de côté près du fossé nous redoublons de vigilance. De temps en temps quelques grands arbres, le long de la route, font écran à la tempête et nous offrent quelques minutes de répit. Nous essuyons aussi une énorme averse qui en moins d’un quart d’heure nous trempe jusqu’aux os. En plus de ce vent le paysage n’est pas terrible. Pendant plusieurs kilomètres nous longeons une autoroute puis ensuite une immense carrière. Angeline ne le montre pas mais je la sens découragée. Son corps qui n’est pas habitué à ce genre d’effort souffre. Après 48 km nous arrivons à grand-peine dans le petit village de Caderousse. Nous avons prévu de faire encore une dizaine de kilomètre jusqu’à Châteauneuf-du-Pape, seule ville équipée d’ un camping, mais exténuées nous décidons de ne pas aller plus loin. Nous nous offrons pour la nuit une superbe chambre d’hôte dans une très vieille bâtisse provençale.
Au matin, à l’heure du départ nous constatons amèrement que le vent n’a pas cessé. Lorsque nous quittons le petit village nous sommes à nouveau face aux éléments déchaînés. Nous ne prenons aucun plaisir à traverser le vignoble de Châteauneuf-du-Pape. Nous passons devant des caves sans même nous y arrêter; le cœur n’y est plus. C’en est trop pour nous. Une fois arrivées à Avignon, plutôt que de lutter encore une étape de plus contre ce satané vent, nous prenons le train pour Arles où nous réservons une auberge spéciale pour voyageurs au pied des arènes. Demain nous aurons toute la journée pour profiter de la ville.
Quel dommage que pour le premier voyage à vélo d’Angeline la météo se soit montrée si mauvaise !
J’espère que cela ne l’aura pas trop dégoûtée du cyclotourisme et qu’elle gardera, malgré tout, le souvenir d’un beau moment de partage et de complicité mère/fille.